Les révélations de l’étude sur le système de rémunérations des agents de l’Etat 

Lancée depuis 2015, par le ministère de la Fonction publique, l’étude sur le système de rémunération au sein de l’administration sénégalaise livre ses secrets. Le rapport final, dont L’Observateur détient une copie, révèle une déstructuration du système actuel de rémunération et que l’application de ses conclusions devraient permettre un retour à l’équilibre rompu depuis l’an 2000. 

De façon plus particulière, l’étude sur le système de rémunération des agents de l’Etat intervient dans un contexte déterminé. Dépeinte comme l’une des meilleures en Afrique francophone, l’administration sénégalaise a connu par le passé un système de rémunération de ses agents plus ou moins adapté et équilibré. Mais ces dernières années, avec l’alternance du pouvoir en 2000, ont été marquées par des dysfonctionnements ayant complètement déstabilisé le système de rémunération et conduit à des iniquités et frustrations ayant une grande incidence sur le rendement des agents de l’Etat et, partant, sur la qualité des prestations de service public.

Des instituteurs aux professeurs d’université en passant par le corps des médecins, le monde syndical était en ébullition avec des grèves cycliques. Et les syndicats des enseignants regroupés dans le G7, après avoir gelé ses plans d’actions pour l’année scolaire 2020-2021, pour s’investir dans la lutte contre la crise sanitaire liée au Covid-19, ont relancé les hostilités avec l’Etat pour exiger le respect des accords signés le 30 avril 2018. Ces syndicalistes qui avaient fait preuve de patience jusqu’ici demandent une correction du système de rémunération des agents de l’Etat.

Ce qui avait poussé, le 30 novembre 2015, le régime du Président Macky Sall à initier une «étude sur la rémunération des agents de l’administration», afin d’assurer une meilleure allocation des ressources publiques et de faciliter ainsi la réalisation des objectifs du Plan Sénégal émergent (Pse). L’étude s’inscrit ainsi dans le cadre de la politique de modernisation de l’administration publique en vue de combattre les lourdeurs et lenteurs des procédures, l’inadaptation des agents aux mutations de l’environnement, leur manque de motivation en raison du bas niveau des rémunérations et afin les disparités et iniquités du système indemnitaire.

«Un régime indemnitaire inéquitable et inadéquat»

Ainsi, le diagnostic de la situation a permis à la mission de relever les principaux points faibles du système de rémunération. Il s’agit, entre autres, d’une architecture de l’échelonnement indiciaire insuffisamment homogène, des disparités dans la progression de carrière de certains corps par rapport à d’autres ainsi qu’à l’intérieur même de certains corps, un régime indemnitaire inéquitable grevant de surcroît la masse salariale, une faible évolution de la valeur du point indiciaire, le recours récurrent à des formes de rémunération non liées aux échelles indiciaires à travers l’octroi d’indemnités différentielles ou l’attribution de soldes globales, un régime indemnitaire inéquitable et inadéquat, un système d’avancement inadapté, des niveaux de rémunération des dirigeants des entités du secteur parapublic trop élevés, et une insuffisante maîtrise des grilles de rémunération des personnels de ces entités.

Pour pallier ces manquements, l’étude recommande de mettre en œuvre une politique appropriée de rémunération dans l’administration publique, s’appuyant sur une organisation optimale et une gestion rationnelle et valorisante des ressources humaines. Ces orientations stratégiques tournent autour de quatre axes portant sur la rénovation proprement dite du système de rémunération, la modernisation et la fiabilisation de la gestion des effectifs et de la masse salariale, le renforcement du dispositif juridique et statutaire de la fonction publique et enfin la rationalisation de la gestion des personnels.

«Mettre en place un système d’évaluation des agents basé sur des contrats d’objectifs»

L’étude renseigne que les 103 358 agents émargeant sur le titre II du budget de l’Etat représentent une masse salariale de 485,2 milliards FCfa sur 1 482,5 milliards FCfa de recettes fiscales, soit un ratio de 32,7%. Et les effectifs du corps des enseignants tous statuts et toutes hiérarchies confondus représentent 82 252 agents, soit plus de 77% des effectifs globaux de la Fonction publique.

Ainsi, le document indique que la rénovation du système de rémunération, stricto sensu, devrait passer par six séries d’actions. D’abord la définition de niveaux réalistes et crédibles de rémunération des fonctions dirigeantes, pour des raisons liées à une identification de la part des agents publics et à la perception des citoyens. Ensuite, le resserrement de l’éventail des échelles indiciaires. Puis un retour à l’orthodoxie statutaire, à travers le respect du principe de la grille indiciaire ; la rationalisation, l’harmonisation et la simplification des régimes indemnitaires ; la mise en place d’un système d’évaluation des agents publics basé sur des contrats d’objectifs, ainsi que d’un dispositif d’avancement incitatif rémunérant la productivité et les performances.

Et enfin, la mise en concordance des grilles salariales du personnel des établissements publics administratifs et de santé, d’une part et des agences nationales, d’autre part, avec la grille indiciaire de l’administration. En attendant l’application des mesures, l’étude demande à l’Etat de signer un pacte de stabilité sociale avec les syndicats d’agents publics.  

(Avec Igfm)